Des biomarqueurs qui pourraient être utiles pour choisir un traitement contre une variante agressive du cancer du poumon
Dans l’adénocarcinome pulmonaire, une étude du Pr. Charles De Smet montre que l’absence d’un groupe d’atomes appelés groupe méthyle (un atome de carbone lié à 3 atomes d’hydrogènes, ou CH3) dans certains gènes est associée à un mauvais pronostic de survie des patients. Cette absence est aussi appelée déméthylation.
Cette observation pourrait fournir des biomarqueurs utiles aux médecins lorsqu’ils doivent faire le choix d’un traitement pour ce cancer du poumon malheureusement fréquent.
Toutes les informations nécessaires au fonctionnement de nos cellules sont inscrites dans les 30 000 gènes que renferme l’ADN. Pourtant, une cellule de la peau est complètement différente d’une cellule du foie. « Cette différenciation cellulaire s’explique par le fait que certains de ces gènes sont utilisés, et d’autres ignorés. Chaque type de cellule utilise un programme d’expression génique qui lui est propre », explique Charles De Smet.
La mise en place et la stabilisation de ces programmes d’expression génique repose en partie sur des modifications chimiques de l’ADN, principalement la méthylation. Ces mécanismes “épigénétiques“ sont essentiels au bon fonctionnement des cellules et de l’organisme tout entier.
Plusieurs études ont montré que les marques de méthylation sur l’ADN sont très largement perdues dans la plupart des tumeurs. Charles De Smet a découvert il y a plusieurs années que cette perte de méthylation conduit les tumeurs à mettre en route un programme d’expression génique qui n’est normalement présent que dans les cellules germinales du testicule.
Les avancées techniques ces dernières années ont permis de constituer des données “génomiques“ et “épigénomiques“ à large échelle à partir d’une grand nombre de cancers. Profitant du soutien en bioinformatique au sein de l’Institut, Anna Diacofotaki, doctorante dans le groupe de Charles De Smet, a décidé d’explorer ces données dans le but de voir si des programmes d’expression génique autres que le programme spermatogénique étaient activés suite à la perte de méthylation dans les tumeurs.
Les résultats ont montré que la déméthylation dans les cancers pulmonaires ne s’accompagne pas seulement de l’activation d’un programme spermatogénique, mais aussi de l’activation d’un programme d’expression spécifique aux cellules de la peau, de l’oesophage et du vagin. De fait, les analyses du groupe ont démontré que les gènes identifiés font bien partie d’un programme d’expression de “stratification épithéliale“.
En poursuivant leur recherche, les chercheurs ont découvert que la déméthylation et l’activation des gènes de stratification épithéliale étaient très étroitement corrélées à un mauvais pronostic de survie des patients atteints d’un adénocarcinome pulmonaire. Ces résultats, publiés dans la revue Cancers, suggèrent que ces gènes peuvent servir de biomarqueurs. « Un oncologue pourrait estimer l’agressivité de la tumeur en se basant sur l’analyse de l’état de méthylation de ces gènes, ce qui est essentiel pour qu’il puisse choisir le traitement le mieux adapté. »
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Jean Fain, Anna Diafotokapi, Charles De Smet |