Des modèles mathématiques capables de mimer des phénomènes biologiques complexes
Le groupe du Pr. Frédéric Lemaigre construit des modèles computationnels qui visent à cibler au mieux les expérimentations à réaliser parmi celles suggérées par les hypothèses de recherche.
Quantifier les effets biologiques, c’est le but de l’équipe du Pr Frédéric Lemaigre en développant des modèles « in silico ». « Nous savons par exemple qu’une certaine protéine stimule la croissance cellulaire. Mais combien? Est-ce de 10 % ou de 50 % ? Les modèles sont très utiles pour quantifier l’impact. »
Pour construire les modèles, les biologistes de son groupe s’associent à des experts en mathématique et informatique. Le biologiste transmet aux collaborateurs les données biologiques telles que, par exemple, vitesse de division d’une cellule, taille de la cellule, vitesse de migration à travers un tissu, etc. Le mathématicien intègre ces données dans des équations mathématiques et construit le modèle in silico. Le biologiste teste ensuite le modèle à l’aide d’expériences. Le cas échéant, le mathématicien affine ensuite son modèle en fonction des résultats des expériences.
Le groupe a développé un modèle de formation des canaux biliaires dans le foie au cours du développement embryonnaire. Avec le modèle, ils ont créé un film informatique qui imite fidèlement le phénomène biologique réel. C’est une science fascinante, mais aussi très utile pour la recherche biomédicale. « Cela nous permet de mieux comprendre les paramètres les plus importants qui dirigent la formation des canaux biliaires. Nous pouvons tester in silico 5 hypothèses en une journée, ce qui prendrait 5 ans pour le faire expérimentalement. » Ils ont constaté que les changements de forme des cellules n’ont qu’un impact minime sur la formation des canaux, alors que d’autres paramètres sont critiques. Ces connaissances sont par exemple très précieuses pour fabriquer des organoïdes, des mini modèles cellulaires de (dans ce cas) le foie.
Un deuxième modèle imite un vaste réseau de protéines, présentes dans les cellules cancéreuses et connues pour stimuler la croissance tumorale. Ce réseau est hautement intégré: la protéine A bloque l’activité de la protéine B, qui stimule la protéine C, qui stimule 3 autres protéines tout en inhibant la protéine A. A l’aide d’un modèle mathématique qui reprend l’ensemble des protéines et leurs régulations, les chercheurs simulent l’effet d’inhibition de - disons - la protéine B. Quel est l’effet sur les autres protéines et dans quelle mesure? Frédéric Lemaigre : « Cela aide à identifier quelles sont les protéines les plus importantes dans un réseau et lesquelles devraient idéalement être ciblées avec des inhibiteurs thérapeutiques. »
‘’ Nous pouvons tester in silico 5 hypothèses en une journée,
ce qui prendrait 5 ans pour le faire expérimentalement. ‘’